Brexit : une panique surjouée

Les marchés flanchent, du moins ce 24 juin à 9h30, mais pas l’économie réelle. Wait and see : attendons que celle-ci reprenne ses droits. En attendant les spéculateurs, pardon les opérateurs à court terme si utiles à l’économie pour apporter une contrepartie, vont prospérer.

Un beau complot … sur le papier

Pour l’économie réelle, aucun changement avant que politiques et juristes ne peaufinent les nouvelles règles. Si l’on était cynique, et adepte de la théorie du complot, on dirait que c’est un coup de théâtre très réussi : on s’installe Bruxelles, on y impose sa langue, on en tire de substantiels bénéfices financiers (rapport Grin) ; on envoie Margaret Thatcher sabre au clair arracher « my money« . En 2016, on envoie David Cameron demander et obtenir de nouvelles concessions pour éviter le départ. Nouvelle réussite. Puis on part pour de bon et on renégocie de nouvelles règles.

On peut même imaginer un super complot : la continuité de la politique séculaire britannique d’éviter la constitution d’une puissance européenne plus forte qu’elle. Napoléon en sait quelque chose. Depuis 1956 cette politique aurait reçu les encouragements américains et a pu se concrétiser après la mort de de Gaulle. Il n’y a donc pas eu d’Europe fédérale, et, maintenant que les opinions continentales ne l’acceptent plus, on peut partir et jouer notre carte.  Bravo perfide Albion !

Mais je ne suis pas un adepte de la théorie du complot, c’est une décision démocratique largement xénophobe, ce qui va faire des adeptes… Les dirigeants britanniques, actuels ou futurs, sont toutefois suffisamment pragmatiques, nationalistes et indifférents aux grandes théories européennes pour en tirer une quatrième fois des avantages pour leur pays.

Pas de panique !

Et la panique actuelle, me direz vous ? Et bien, comme toutes les paniques, elle passera. Ce qui compte à moyen terme, en bourse comme dans l’économie réelle, ce sont les résultats des entreprises, et on ne voit pas de bouleversement sanglant à court terme.

Cette panique a d’ailleurs été à mon avis surjouée, d’une part sur le plan intérieur pour les besoins de la campagne électorale, d’autre part et souvent maladroitement par les dirigeants internationaux, à commencer par Obama et les autorités de Bruxelles.

Au fur et à mesure que la possibilité du Brexit se précisait, on a d’ailleurs vu se poser des questions plus concrètes, dont les résultats qui n’étaient pas tous négatifs. Paris et Francfort espèrent notamment hériter d’une partie de l’activité financière de la City. D’ailleurs, était-il vraiment sain à l’échelle mondiale de voir une telle accumulation de richesses, pas toujours très catholiques, dans une seule ville, avec à son service les meilleurs cerveaux de la planète, dont beaucoup de Français ?

En tout cas les Londoniens en étaient fort agacés, et ont élu un maire très réservé sur les inégalités, notamment immobilières, que cette accumulation entraîne, sans parler d’une vraisemblable distorsion de productivité entre cette activité financière et l’ensemble des autres. C’est un peu à l’image de ce que l’on constate dans les pays frappés par « la malédiction du pétrole », nominalement riches, mais dont l’économie se délabre.

The Economist nous rappelle d’ailleurs que tout changement est source d’opportunités. Saurons-nous les saisir ?

Yves Montenay

A lire également : Brexit : François Hollande ira-t-il bouter l’anglais hors de Bruxelles ?

3 commentaires sur “Brexit : une panique surjouée”

  1. La présence de la GB dans l’UE n’était-elle pas un cheval de Troie pour les Américains ? Le Brexit pourrait-il nous en débarrasser ?

    1. Cheval de Troie ? Oui, c’était d’ailleurs affiché. Maintenant, serons-nous capables de faire mieux sans les Anglais, je ne sais pas. Je pense que ce sont de redoutables négociateurs et qu’ils trouveront le moyen de garder un pied dedans. D’autant que notre gouvernement, et probablement plusieurs autres gouvernements européens n’ont pas de vision politique claire.

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